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"Mama" Muilu Kiawanga Nzitani Marie, patriarche et martyre kimbanguiste.
Article de NGOMA Saturnin

27 avril 1959 – 27 avril 2010, cela fait exactement cinquante et un ans (51 ans) depuis que notre vénérable Mère, mama Muilu Kiawanga Nzitani Marie, quittait la terre des hommes pour l’au-delà. Par devoir de mémoire, l’église kimbanguiste honore annuellement cette date anniversaire du 27 avril de l’illustre patriarche et martyre kimbanguiste par la prière et la louange. En cette date mémorable, les kimbanguistes se souviennent de tout ce qu’elle a fait et souffert pour le kimbanguisme. D’où, ce petit commentaire du révérend Kalonzo Katalayi[1]: « C’est grâce à cette maman que « le kimbanguisme dans la clandestinité » a pu tenir jusqu’à prendre la forme que nous lui reconnaissons aujourd’hui »[2].

Après s’être sacrifiée puis investie sans relâche pour la survie du kimbanguisme, elle n’a malheureusement pas eu la chance de voir se concrétiser la reconnaissance officielle de l’E.J.C.S.K qui a eu lieu le 24 décembre 1959, quelques mois seulement après sa mort.

En l’absence de Papa Simon Kimbangu emprisonné, mama Muilu Kiawanga marie a valablement servi de caution morale au kimbanguisme, de la clandestinité jusqu’à la tolérance [3]; devenant ainsi un véritable patriarche de ce qui était déjà au dedans une vraie église, mais qui apparaissait encore au dehors comme un simple mouvement religieux. Pour les fidèles et sympathisants,
personne d’autre qu’elle ne pouvait mieux incarner le kimbanguisme, d’autant plus qu’elle n’avait jamais quitté les abords de la terre sacrée de Nkamba.
De jour comme de nuit, elle recevait et réconfortait sur place les pèlerins venus clandestinement se baigner dans les eaux de Mpumbu[4]. Et ces derniers n’ont jamais tari d’éloges sur sa générosité devenue légendaire. En effet, leurs témoignages sont formels: quoique vivant dans une incontestable précarité, mama Muilu Kiawanga Nzitani Marie n’hésitait pas à partager le peu qu’elle avait, en donnant en mains propres ou en faisant parvenir à quiconque « quelque chose » à manger et à boire.

Epouse unique et légitime de Papa Simon Kimbangu, mama Muilu Kiawanga Nzitani Marie a d’abord été le tout premier témoin de l’éclosion de l’œuvre missionnaire de son mari, et ensuite la fidèle continuatrice de celle-ci au lendemain de l’arrestation de ce dernier.
Son martyre commence lorsqu’elle sera arrêtée à son tour en compagnie de ses deux enfants: Dialungana Kiangani âgé de 5 ans et Diangienda Kuntima âgé de 3 ans.
Comparue comme témoin à décharge lors du jugement de son mari, emprisonnée pendant quelque temps puis assignée à résidence surveillée à Ngombe Kinsuka[5], elle ne reniera jamais sa foi inoxydable en Jésus Christ ni la véracité de la mission salvatrice confiée par celui-ci à son mari.
A plusieurs reprises, les autorités coloniales belges tentèrent de la déstabiliser en recourant à toutes sortes d’humiliations, en lui rapportant des fausses nouvelles sur la vie carcérale de son mari et également en la privant de toute aide extérieure. Mais son courage et sa détermination, à poursuivre à tout prix les idéaux du kimbanguisme, eurent raison de leur acharnement.

Femme de principe et de conviction dotée d’une spiritualité manifeste, elle a su préserver et consolider brillamment dans un contexte politique[6] et social[7] difficile, cette œuvre de la foi initiée par son mari.
Malgré la vie misérable qui était la sienne, les strictes restrictions à sa liberté de mouvement, les tracasseries policières sans cesse renouvelées et les intempestifs assauts sentimentaux d’hommes mal intentionnés; mama Muilu Kiawanga Nzitani Marie n’a pas voulu renoncer consciemment à son engagement spirituel, pour lequel il n’existait d’ailleurs à ses yeux aucune autre alternative possible.
Cette attitude jusqu’au-boutiste, rare chez les femmes africaines d’avant les indépendances, lui avait valu pour tout le reste de sa vie beaucoup de respect, une vraie considération et une grande reconnaissance de la part de ceux qui étaient acquis à la cause du kimbanguisme. Par conséquent son charisme, son leadership et son autorité ont été spontanément reconnu par les principaux dirigeants kimbanguistes des trois Congo (belge, français et portugais).

Recluse tout au début dans sa misérable habitation de Ngombe Kinsuka, avant qu’on ne l’autorisât par la suite, à aller au-delà d’un certain périmètre, mama Muilu Kiawanga Nzitani Marie était très épiée dans ses moindres gestes et mouvements.
Aucune personne animée de bonne volonté (parent, ami ou connaissance...) ne pouvait lui rendre visite, l’aider, l’assister ou la soutenir, sous peine d’emprisonnement voire de relégation. Cela étant, au vu et au su de tous, peu de gens ont osé témoigner matériellement leur compassion à cette pauvre mère de famille martyrisée.
Mama Muilu Kiwanga Nzitani Marie vivait quotidiennement dans une solitude et un isolement absolus qui, auraient pu rendre dépressive n’importe quelle femme bien portante. Ce n’est qu’en 1933 qu’elle put avoir pour la toute première fois la permission de sortir de Ngombe Kinsuka. Après qu’on ait vérifié qu’elle n’avait pas sur elle « l’eau et la terre »[8] de Nkamba, elle s’en alla aussitôt rencontrer son fils aîné Kisolokele Lukelo scolarisé à Boma depuis 1921.

Mis à part la foi et la prière qui étaient ses armes de poing dans cette vie de combat interrompu, elle bénéficiait aussi du soutien spirituel de Papa Simon Kimbangu, qui, bien qu’incarcéré à Lubumbashi, à plus de 2000 kilomètres de Ngombe Kinsuka, visitait régulièrement sa petite famille. Il lui apparaissait de son propre chef ou à la demande de celle-ci quand elle était vraiment dans l’impasse.
Ces mystérieuses visites privées effectuées à l’insu de tous, demeurèrent pendant longtemps un secret bien gardé, car divulguer une telle information risquait d’attirer à sa femme et ses enfants plus d’ennuis qu’ils en avaient déjà.

Pour les femmes kimbanguistes, mama Muilu Kiawanga Nzitani Marie est le modèle parfait et l’exemple même à suivre. Non violente, pieuse, vertueuse, austère, humble, fidèle à son mari et à son Dieu, détachée des penchants matérialistes... elle a fait mentir le proverbe selon lequel : « basi batongaka mboka te »[9]. Devant l’incrédulité ou le peu de foi dont on a souvent fait preuve la plupart des épouses des prophètes bibliques, elle s’interrogeait constamment dans ses prières quotidiennes si pour sa part la victoire sera spirituellement au rendez-vous ?

Le 29 avril 1959, jour de son enterrement à Ngombe Kinsuka, il y eut apparition inespérée d’anges qui, en se déplaçant d’un point à un autre, semblaient manifestement célébrer à leur façon cette fameuse victoire. Ceux à qui l’on avait spirituellement ouvert les yeux, virent par la suite Papa Simon Kimbangu et mama Muilu Kiawanga Nzitani Marie vêtus de blanc s’élever progressivement de la terre vers le ciel, accompagnés dans leur ascension par les anges en question.
Cela atteste le fait que notre vénérable mère avait réellement tenu sa promesse: celle de devenir notre principal intercesseur auprès de Dieu le Saint Esprit Papa Simon Kimbangu.

Sous d’autres cieux, l’évolution de la société et par ricochet du statut de la femme n’a point amélioré la situation de celle-ci. Considérée à tort comme faible de corps et d’esprit, son rapport au sacré se trouve ainsi limiter et par conséquent elle est d’office exclue du sacerdoce. En aucun cas, on ne reconnaît à la femme le droit d’enseigner les hommes ni d’intercéder pour eux. Dans certains lieux de cultes, sa simple présence n’est toujours pas tolérée.
Dans son article « Femmes à l’épreuve des religions », Marie Guermont soutient que selon le Talmud « apprendre la Torah à sa fille c’est lui enseigner des obscénités, mieux vaut brûler la Torah que de la confier à une femme »[10].
Mais, grâce à mama Muilu Kiawanga Nzitani Marie, les femmes kimbanguistes ont pratiquement les mêmes droits et obligations que les hommes. Étant spirituellement égaux devant Dieu, ils sont aussi matériellement égaux dans le sacerdoce. Aujourd’hui, cette égalité entre l’homme et la femme s’est pérennisée à tout jamais au sein de l’église kimbanguiste.
Pour la postérité, il sied de rappeler que c’est le courage et la détermination, de mama Muilu Kiawanga Nzitani Marie, qui ont été à l’origine de la création de l’A.F.KI le 8 octobre 1965.

A l’occasion du 30e anniversaire de la mort de sa maman[11], Papa Diangienda Kuntima nous révéla entre autres quelques traits caractéristiques de sa profonde spiritualité.
Primo. Mama Muilu Kiawanga Nzitani Marie avait une crainte irréprochable de Dieu. Elle priait constamment tout en observant les commandements. Sévère envers elle-même et aussi envers ses enfants, elle est restée elle-même en toute circonstance. Dans le bonheur comme dans le malheur, elle ne cessait de se confier à Dieu au point d’avoir avec lui une parfaite relation spirituelle, comme le prouve ces deux autres traits.
Secundo. En cas de nécessité absolue, quand elle avait vraiment besoin du concours de quelqu’un qui se trouvait à l’instant même à Kinshasa (par exemple), il lui suffisait juste de prier dans ce sens-là et en une fraction de seconde, l’individu en question se présentait devant elle en chair et en os.
Tertio. Mama Muilu Kiawanga Nzitani Marie avait cette faculté de prédire les événements en scrutant attentivement l’horizon. En effet, une fois qu’elle s’était levée et vaquait déjà à ses occupations, elle pouvait d’un simple regard sur la voûte céleste affirmer avec assurance qu’aujourd’hui tel événement allait se produire. Et à la surprise générale, au cours de la même journée sa prédiction se réalisait sans faute avant le coucher du soleil.


NGOMA Saturnin
26 avril 2010


NOTES :

[1]. Actuel directeur national de la PRESKI de la R.D.C.

[2]. Introduction au message de Papa Diangienda Kuntima du 27 avril 1991.

[3]. Se référer à l’œuvre de Diangienda Kuntima, « L’histoire du kimbanguisme , Editions kimbanguistes, 1984.

[4]. Ancienne appellation de la source sacrée de Nkamba.

[5]. Village situé dans la colline voisine de Nkamba, le village de Papa Simon Kimbangu.

[6]. A l’époque coloniale, le colonisé était à la merci du colon et n’avait d’autre choix que d’obéir.

[7]. La prédominance des coutumes reléguait la femme au second plan et elle ne pouvait diriger les hommes.

[8]. Ils ont des vertus thérapeutiques avérées.

[9]. Proverbe congolais qui signifie que «Entre elles, les femmes ont souvent tendance à (se) détruire au lieu de construire».

[10].« La Raison » N°45, novembre 2009, P 18.

[11]. 27 avril 1987 à Nkamba nouvelle Jérusalem.


 
 
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